Qui pilotera l'avion de demain ?
La transition se fera en passant à un seul pilote (22,4 %), puis à zéro, le seul à bord étant le commandant. Par souci d’économie, on peut imaginer un avion avec un pilote unique encore plus assisté par des automatismes.
Comme nous l’avons vu, cet essai a pour ambition de discuter de l’évolution du métier de pilote de ligne à l’horizon de la décennie 2030, au moment du remplacement du Boeing 737 (1967) et de son concurrent le plus direct l’Airbus 320 (1987).
Dans ce chapitre, j’analyse différents scénarios probables – d’après les réponses données à mon questionnaire en ligne, “Future of Air Transport Survey” –, basé sur trois modes de gestion de l’avion :
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depuis le cockpit, selon le modèle actuel avec deux pilotes, ou bien renforcé par la réintégration d’un ingénieur navigant, puis du mono-pilote ou technicien seul ;
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depuis la cabine passagers, par le chef de cabine ou un passager désigné ;
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du sol, par le centre de contrôle des opérations aériennes de la compagnie ou du contrôle aérien ;
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avion totalement autonome.
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1. Depuis le cockpit
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a. Si l’on conserve la configuration actuelle, le couple homme/machine donne actuellement pleine satisfaction. Il est le plus performant pour gérer à la fois les situations simples et routinières (avec l’aide des automatismes) et celles, rares et complexes, qui nécessitent l’intervention de l’intelligence humaine.
En effet, malgré l’augmentation du trafic, la sécurité aérienne a continué à progresser démontrant ainsi que les outils mis en place ont été efficaces. Il est donc légitime de penser que cette tendance va se poursuivre au niveau :
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des équipements de l’avion avec :​
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l’amélioration des systèmes actuels, notamment celui de la gestion des pannes, qui exécute leurs traitements après vérification et validation du pilote ;
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l’ergonomie de l’interface homme/machine ;
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l’introduction de nouveaux pilotes automatiques plus robustes capables de supporter, sans se déconnecter, des pannes d’alimentation d’air (prise Pitot), gyroscopiques (centrale à inertie), navigation (FMS), alimentation électrique (PA sur batterie propre), etc., de sortir d’une position inusuelle (vol dos) et de récupérer un décrochage ;
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des Facteurs humains, par l’amélioration des relations au travail et des performances cognitives (voir chapitre Facteurs humains (FH) et Fatigue et stress).
b. Par la réintroduction de l’officier mécanicien navigant (OMN), ce qui relève d’une démarche anti-conventionnelle dans un monde productiviste où l’objectif est de diminuer le coût et la gestion de l’humain par des automatismes chaque fois que cela est possible. Cependant, face à la complexité croissante des systèmes, l’OMN retrouverait une place que je vais essayer de justifier en développant un scénario différent de la pensée dominante, sans aucun parti pris de ma part, car, en 18 000 heures de vol, je n’ai jamais volé avec un mécanicien navigant. L’OMN deviendrait alors :
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un officier électromécanicien navigant (OEN), c’est-à-dire un ingénieur en électronique capable de descendre en profondeur dans les systèmes de l’avion pour les restaurer et les débugger, notamment en cas d’action malveillante;
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un homme supplémentaire qui offrirait davantage de garantie en termes de sécurité lors de la visite prévol, du chargement des soutes, particulièrement pour les matières dangereuses et le chargement des vols cargo ;
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un spécialiste qui dialoguerait d’égal à égal avec les électroniciens au sol, à la base ou à l’autre bout de la planète ;
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un aide-pilote (après formation) pour économiser le pilote de renfort, durant le vol en croisière, sur les avions long-courriers qui sont souvent en équipage renforcé ;
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et un troisième expert qui aurait davantage de recul sur l’environnement et les différentes situations et qui pourrait déceler un problème non détecté par les deux pilotes.
En cas d’évènement majeur, comme le crash occasionné par un feu incontrôlable dans le cockpit du Swissair 111 en 1998, il aurait pu sauver l’avion. Cet accident illustre d’ailleurs parfaitement ce type de situation difficilement gérable à deux pilotes accaparés par leurs checklists et le pilotage de l’avion. Un OMN ou OEN, plus mobile et à l’esprit plus mécanique et électronique, aurait mieux compris la situation (voir Le manuscrit).
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Autre incident grave en 2001 : la panne des deux moteurs de l’Air Transat au beau milieu de l’Atlantique (voir Le manuscrit). Cette panne complexe et rare a conduit à une fuite de carburant importante qui aurait pu être comprise et traitée par un électromécanicien. Grâce à cette expérience, les pilotes sont aujourd’hui plus sensibles à ce risque, mais demain une autre panne pourrait les pièger plus facilement qu’un électromécanicien.
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La question suivante se posera : à partir de quelle taille d’avion et de niveau de complexité devra-t-on réintroduire ce navigant ? L’incident grave de l’A380 de Qantas, en 2010, est d’ailleurs édifiant. Un mécanicien ou un électronicien parmi l’équipage aurait apporté une aide précieuse face à la déferlante de pannes.
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Paradoxalement ils n’ont pas totalement disparu des cockpits et existent toujours en tant qu’ingénieurs mécaniciens navigants (Flight Test Engineer) pour tester et valider tous les nouveaux systèmes des avions en phase de développement et de certification. Ces dernières années, ils ont participé aux premiers vols de l’A380 (2005), du B787 (2009) et de l’A350 (2013). Les pilotes d’essais – aussi capables soient-ils – ne peuvent pas avoir toutes les compétences et la disponibilité pour gérer des systèmes très complexes, particulièrement en cas de défaillance. La difficulté des nouveaux programmes a fait prendre à l’A380 deux ans de retard et trois pour le B787. L’A350 s’en est bien sorti en profitant de leurs expériences, notamment sur le choix des batteries.
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J’avais posé la question de la réintroduction des officiers mécaniciens navigants au président du Syndicat des officiers mécaniciens navigants de l’aviation civile (SNOMAC), qui m’avait répondu ainsi : « Les interlocuteurs : il y a l’administration, les constructeurs et les exploitants d’un côté, et les syndicats, associations et usagers de l’autre. Les évolutions se font à travers des rapports de forces entre ces entités. Ce sont le pouvoir de l’argent des uns et le pouvoir de “nuisance” des autres qui placent la ligne. Les arguments, pour les uns, il y a :
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l’argent, le centre du débat pour nos actionnaires. Il faut démontrer que cette réintroduction se fera à coût constant. Si le salaire de l’officier mécanicien navigant n’est pas prélevé sur le salaire des pilotes, il faut prouver les gains escomptés en exploitations ;
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la sécurité étant elle aussi une affaire de coût, il faut démontrer que l’amélioration sera chiffrable.
Pour les autres, il y a la conviction que cela sera mieux pour eux. Là encore nous retrouvons l’argent comme vecteur d’échange. Les pilotes sont-ils demandeurs de cette réintroduction ? Qu’ont-ils à y gagner ? Les usagers sont-ils demandeurs d’une sécurité meilleure ?
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Dans cet inventaire, notre organisation n’a de moyens ni pour convaincre ni pour contraindre qui que ce soit, notre écoute n’est plus de mise depuis des années, et notre pouvoir de nuisance est nul. Un autre aspect de la démarche doit être pris en compte, c’est la viabilité de la carrière pour celles et ceux qui se lanceraient dans le métier. Les réintroductions, à l’instar de celle des ours, ne fonctionnent qui si le milieu n’est pas hostile. Les officiers mécaniciens navigants ayant disparu du marché de l’emploi, ce sont forcément des jeunes qu’il faudra introduire et les “ré-introducteurs” ont le devoir de leur assurer une carrière complète » (Serge Coulombel, 8 avril 2011).
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Il est possible que les premiers vols de l’avion sans pilote s’effectuent avec des pilotes d’essais et un mécanicien d’essais…
c. La transition se fera en passant à un seul pilote (22,4 %), puis à zéro, le seul à bord étant le commandant. Par souci d’économie, on peut imaginer un avion avec un pilote unique encore plus assisté par des automatismes, comme pour la procédure « descente d’urgence » (développée par Airbus), des remises de gaz automatiques en cas d’alarme de proximité du sol inattendues (GPWS), d’arrivées non stabilisées (précipitées) ou d’approches non satisfaisantes (limitations masse, vent, piste contaminée, etc.) et autres traitements de pannes.
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Mais l’apprentissage des jeunes pilotes est long, et l’on ne devient pas commandant de bord du jour au lendemain. Sans compter la maturité nécessaire, il faut « faire vieillir » les jeunes pour qu’ils acquièrent une véritable expérience qui se comptabilise en milliers d’heures de vol à bord de vrais avions.
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Actuellement, dans les cockpits, on trouve souvent un commandant expérimenté assisté d’un jeune copilote qui apprend le métier ou qui acquiert de l’expérience. Le rôle de l’ancien – l’expert – est essentiel pour l’apprenti qui doit être accompagné pendant sa formation initiale par un instructeur – comme le compagnonnage existant chez les maçons ou les chirurgiens. Confierait-on la construction d’une maison ou une opération chirurgicale à un débutant ?
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Se former à distance serait inconsistant et absurde. En revanche, la partie acquisition d’expérience pourrait se faire par un suivi plus rigoureux d’un pilote assistant au sol.
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Actuellement, la répartition des tâches de travail au sein d’un équipage consiste, en autres, en un contrôle mutuel des tâches des pilotes. Lorsque l’un effectue une action, l’autre la vérifie. Par exemple si le contrôle aérien autorise l’avion à changer d’altitude (niveau de vol), le pilote en charge du pilotage sélectionne l’altitude, et l’autre s’assure qu’il s’agit bien de celle autorisée et veille à sa mise en œuvre. S’il n’y avait plus qu’un seul pilote, la vérification devra se faire par une tierce personne extérieure à l’avion ou par un système totalement indépendant.
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Il faudra aussi régler la question de l’incapacité (malaise, voire décès) du seul pilote restant à bord ou tout simplement celle de la satisfaction de ses besoins physiologiques. Par sécurité, le principe de deux systèmes identiques au minimum à bord d’un avion commercial devrait aussi s’appliquer aux pilotes.
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Il pourrait se produire que des passagers exigent qu’un responsable de la compagnie les accompagne pour leur servir de garantie. Mais s’il devait rester un responsable dans l’avion, celui-ci devrait être un vrai pilote, car il me semble difficile de suivre toutes les directives du sol sans heurt. Chacun ayant sa vision de la situation, la personne qui la vivra en réel, engageant sa propre vie, pourrait s’opposer aux directives, comme cela a été le cas lors du premier vol dans l’espace de Youri Gagarine en 1961. Telle la plaisanterie d’ingénieur : « Un pilote et un chien sont dans un cockpit. Le pilote est là pour donner à manger au chien, et le chien surveille que le pilote ne touche à rien… »
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Boeing estime nécessaire de former 450 000 nouveaux pilotes pour les vingt prochaines années. Pour faire face à cette pénurie annoncée, l’équipementier français Thales travaille sur un cockpit mono-pilote d’avion de ligne pour 2030, où le deuxième pilote, celui de secours, sera au sol. Pour l’Américain Rockwell Collins, numéro un mondial en avionique, il est possible dès à présent de faire voler un avion de ligne avec un seul pilote. De son côté, le constructeur brésilien Embraer propose un avion mono-pilote sur la base du Phenom 100 pour les années 2020-25.
d. Vers un technicien (informaticien) de la compagnie, capable de débugger, reseter en vol certains systèmes de l’avion (14,3 %).
Ce scénario se rapproche de celui développé pour la réintroduction du mécanicien navigant. Le technicien se retrouverait dans une position particulière en procédant à des « réparations en vol » sans gêner la marche du vol. Une coordination efficace devrait être démontrée entre le technicien à bord et ceux au sol. La qualité des communications sera déterminante et un travail préparatoire au simulateur, nécessaire.
2. Depuis la cabine passager
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Le responsable de la gestion de l’avion est le chef de cabine (2,9 %) ou un passager volontaire (0,4 %).
Cette solution risque de ne satisfaire personne : le chef de cabine pourrait être confronté à des problèmes techniques qui ne relèvent pas de ses compétences, le passager volontaire se demanderait ce qu’on attend vraiment de lui, même s’il a quelques notions de pilotage ou une expérience en aéro-club, les passagers ne verraient qu’un pis-aller dans cette solution peu rassurante et la compagnie préférerait avoir le contrôle direct et total de l’avion.
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En revanche, si les pilotes étaient supprimés, le rôle du chef de cabine serait renforcé en devenant l’interface directe et privilégiée de la compagnie, particulièrement lorsqu’il s’agit de problèmes liés aux passagers, notamment pour la gestion du déroutement si un passager malade nécessitait une intervention médicale urgente.
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3. Du sol
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a. Un opérateur de la compagnie aérienne (22 %) pourrait suivre le vol d’un ou plusieurs avions à la fois, ce qui augmenterait d’autant sa productivité. En dehors des décisions de routine, il appliquerait des décisions collégiales, validées par le responsable du centre de contrôle des opérations (CCO) de la compagnie.
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b. Si ce sont les contrôleurs aériens (9,5 %), ils pourraient exiger d’avoir le contrôle direct des avions. En revanche, les pilotes d’avions classiques risqueraient de manifester de la résistance à cohabiter avec ceux sans pilotes et autres drones.
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La comparaison habituelle entre l’avion et des véhicules comme le VAL (véhicule automatique léger) ou les métros automatiques est peu réaliste. Ces derniers évoluent lentement dans un environnement protégé et sur de faibles distances. Ils sont posés sur des rails, et en cas de panne ils s’arrêtent. De plus les entrées et les sorties des voitures sont aisées et rapides, et ne mettent pas en danger la vie des passagers. Cependant, la SNCF envisage des TGV sans conducteur à partir de 2021.
Cette décentralisation soulèverait d’autres difficultés, notamment celle d’un risque de représentation erronée de l’environnement extérieur ; météo, relief, trafic aérien, risque aviaire, etc. et intérieur ; bruits anormaux, odeurs, problèmes rencontrés avec les passagers, l’équipage, etc.
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Il est parfois reproché aux cadres d’entreprises de n’être pas suffisamment présents sur le terrain ni au contact avec la réalité (marché, clients). Est-ce que des spécialistes qui se trouvent à une distance éloignée – jusqu’à vingt mille kilomètres – pourront être aussi impliqués, aussi sensibilisés à l’environnement de l’avion que des opérateurs sur place ?
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Ce choix de la mise à distance de la tête (CCO ou contrôle aérien) et du corps (avion) irait à l’encontre des choix de la nature (ou de Dieu) qui concentre quatre des cinq sens au plus près du lieu décisionnaire.
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Dans cette logique, l’opérateur responsable pourrait aussi avoir des experts, non pas près de lui mais à distance du CCO ou du contrôle aérien. Ce qui faciliterait les questions de permanence, notamment la nuit, les week-ends et les jours fériés, mais la chaîne de la communication et la qualité des échanges entre l’avion, le CCO ou le contrôle aérien et l’expert, seraient alors encore plus fragile.
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Ceux qui prétendent mettre en place des systèmes de communications infaillibles ou inviolables entre l’avion et le sol sont des imposteurs. Les hackers sont capables de pénétrer n’importe quel système de sécurité, ce n’est qu’une question de moyens et de temps. Les adolescents enverront des virus par jeu, les adultes par bravade, vengeance, ou pour nuire à une compagnie concurrente, et cela offrirait aux terroristes et malfaiteurs de nouvelles opportunités de cyberattaques. Le cryptage et le décryptage renforcés des transmissions nécessitent des moyens importants et demandent du temps, ce qui est difficilement compatible avec la prise de décisions rapides en vol.
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Autres risques : par peur des sanctions, des erreurs ou de mauvais choix pourraient être dissimulés par des opérateurs isolés ou travaillant seuls, avant qu’ils ne se révèlent dangereux, à l’image du scandale de la Société Générale, en 2008, qui a été mise en difficulté par l’un de ses traders.
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4. Avion totalement autonome
L’ordinateur de bord déciderait seul (11,6 %) : cette solution me paraît prématurée pour la décennie 2030. D’une part la question de la panne d’ordinateur et/ou de communications avec le sol se posera toujours, et d’autre part les ingénieurs ne peuvent pas modéliser toutes les situations qui pourraient se présenter en vol. Il faudrait donc faire appel à l’intelligence artificielle, capable de prendre des décisions aussi pertinentes qu’un opérateur humain.
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Pour valider un concept sécuritaire, il faut impérativement faire la démonstration de sa bonne gestion particulièrement en cas de pannes simples, mais aussi importantes et multiples. Or, leur nombre pour un avion moderne est infini (cas du Qantas).
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Un ordinateur en charge de la navigation d’un avion ne pourra pas éviter un danger si celui-ci n’a pas été répertorié ou interprété comme tel. L’ensemble des risques de l’environnement d’un avion nécessite une très grande quantité d’informations que l’ordinateur devra analyser pour s’en faire une représentation réaliste. Il y aura toujours une part d’incertitude (la météo) qui pourrait ne pas faire réagir l’ordinateur qui, sans conscience de soi ni de la mort, n’aura jamais peur, même s’il envoie l’avion contre une montagne.
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Pour se rapprocher des performances d’un être vivant, la machine devra être munie de nombreux capteurs ultrasensibles, capables d’analyser toutes sortes de données en temps réel. Avoir des sensations ne caractérise peut-être pas l’intelligence permettant de résoudre des problèmes, mais bien l’instinct de survie. Pour que l’intelligence artificielle devienne égale ou supérieure à l’homme, si elle est développée sur le modèle humain, elle devra être capable d’émotions qui permettent d’exprimer des sentiments, de faire des arbitrages, conditions nécessaires à la prise de décision (Damasio).
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Est-ce qu’une personnalité de premier rang comme le président d’un pays choisirait un avion sans pilote ? Peut-on imaginer Air Force One, l’avion du président américain, sous la responsabilité d’un automate ? Comment envisager sinon que des dirigeants et autres VIP, qui maîtrisent leur destin et le nôtre, prennent des avions avec des pilotes, et le commun des mortels, un low cost sans pilote ? Les compagnies aériennes instaureront-elles un supplément sur le billet d’avion pour ceux qui veulent voyager avec un pilote à bord ?
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Si les automatismes sont plus sûrs que l’homme, il ne faut pas oublier qu’ils sont aussi responsables d’accidents. Par ailleurs, les défenseurs du tout-automatique s’excluent de facto de toute organisation professionnelle.
Mais il faudrait aussi prendre en compte la réaction des pilotes qui n’auront pas l’intention de se laisser déposséder de leur métier. Déjà, en France, le passage de l’équipage technique de trois à deux ne s’est pas fait sans difficulté : Air France a dû repousser l’arrivée du B737 (à deux pilotes) de près de dix ans, et Air Inter a subi les grèves les plus dures de son existence. Les compagnies aériennes savent qu’elles s’exposeront à l’hostilité des pilotes et qu’elles risqueront de subir des grèves de protestation, même celles qui se créeront pour la circonstance en n’opérant que sur des avions sans pilote.
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Et il n’est pas certain non plus que les grands constructeurs prennent un tel risque, sauf à s’entendre pour produire en même temps un avion sans pilote.
Attention aux mutations technologiques (Jacomy), car la sécurité s’est dégradée au tout début des avions à réaction et électroniques qui ont connu une série d’accidents. L’opinion publique pourrait rejeter ce nouveau concept, car la peur de l’avion avec pilote existait déjà, et elle pourrait être amplifiée par l’inconnu, d’autant que la majorité des passagers comptent encore sur les pilotes pour les sortir d’une mauvaise passe.
En effet, il n’existe pas encore de robots héroïques, sauveurs d’avions en péril. Néanmoins, compte tenu des pressions économiques, de la pénurie de pilotes qui s’annonce, d’un système où la sécurité serait meilleure sans pilote qu’avec, et afin d’en finir avec une population jugée parfois encombrante du fait de son corporatisme, le scénario de l’avion sans pilote reste crédible.